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INFORMATIQUE MUNICIPALE : GABEGIE LA MAGNIFIQUE ! Une grande enquête du Delanopolis !



L'originalité du Delanopolis, vous nous l'accorderez, est de ne pas nous contenter des billets, poulets et articulets qui forment la quasi-totalité de la pitance rédactionnelle produite sur Internet. Mais, parfois, de prendre le temps d'approfondir une question.

Cette semaine, première partie donc d'une enquête fitzgeraldienne sur un gaspillage delanoesque aussi important qu'édifiant : l'informatique municipale. Utile à toutes celles et tous ceux qui se demandent comment leurs impôts locaux ont pu en arriver là !



INFORMATIQUE MUNICIPALE : GABEGIE LA MAGNIFIQUE ! Une grande enquête du Delanopolis !
Le 7 octobre 2009, la Chambre régionale des comptes d’Ile-de-France a rendu un rapport particulièrement sévère pour la gestion de l’informatique de la ville de Paris. Ce document austère et écrit sur un ton fort prudent est passé à la trappe dès sa sortie, son existence même étant à peine mentionnée dans les médias.

Mais le Delanopolis se l'est procuré, l'a confronté à sa propre connaissance de la situation parisienne et il est en mesure de démontrer que, depuis l’élection du phénix autoproclamé de la gestion publique, la conduite des opérations informatiques relève de la pétaudière.

1 - Commençons par le commencement : la constatation de « faiblesses dans le pilotage des projets ». Tendre est la nuit ...

A travers plusieurs exemples, on découvre que la conduite des projets informatiques parisiens se fait en dépit du bon sens, ce qui entraîne des dysfonctionnements, des retards et un énorme gâchis d’argent public.

o Pour bien marquer son sérieux et la rupture avec les temps moyenâgeux d’avant l’élection du condor de la bonne gestion, la ville s’est dotée en 2002-2003, avec tambour et trompettes, d’un « Schéma directeur informatique » censé guider la politique d’investissement en la matière. Las ! La Chambre des comptes constate d’abord que « le suivi sélectif des projets dans les tableaux de bord ne permet pas à la ville d’avoir une vision consolidée de l’ensemble des projets contenus dans le schéma directeur informatique ». Puis, la Chambre cite la société Ernst &Young qui, missionnée par la ville pour faire le bilan de sa politique, propose dans son diagnostic « la mise en place d’un reporting de suivi de l’intégralité des projets via le développement d’un outil de gestion de portefeuille projets permettant d’obtenir une vue exhaustive et consolidée de l’ensemble des projets. »

En d’autres termes, les magistrats des comptes constatent que les projets, qui ont un coût variant de plusieurs centaines de milliers à plusieurs millions d’euros, font l’objet d’un pilotage à vue. Répondant à la Chambre sur ce point, « l’ordonnateur a déclaré qu’un nouveau dispositif de suivi serait prochainement mis en place. Il envisage de se doter d'un nouvel outil de reporting qui permettra de consolider les informations remontant des projets. Le secrétariat général se dotera, en outre, d'un tableau de bord stratégique ». Il serait temps, cela ne faisait que depuis 2003 que la ville disposait du fameux SDI !

o Ce ne serait malgré tout pas du luxe car le rapport de la société UNILOG ( encore une autre société missionnée par la ville pour ausculter sa politique informatique …) relève que « l’évaluation des gains et apports s’est révélée très insuffisante. » La ville a répondu à cette critique qu' «Il n'existe pas encore de dispositif rigoureux et généralisé d'évaluation des gains de productivité attachés à la mise en œuvre des projets SI. » Ah ? Plus de SDI ? En ce qui concerne l’existence d’une démarche et d’outils de contrôle de gestion des dépenses informatiques, la ville fait valoir qu' : « Aucune démarche systématique de contrôle de gestion n'a été entreprise au démarrage du SDI, en dehors du contrôle interne à la DSTI. Toutefois, une étude visant à établir le coût complet de possession du poste de travail informatique est en cours de lancement. »(Espérons qu’elle atterrira un jour…).

o Illustration de ce pilotage à vue, de nombreux projets ont dû être redéfinis en cours de route. Les magistrats constatent que le schéma directeur est peu précis en ce qui concerne la définition des priorités. L’exemple du projet « Patrimoine » est édifiant, lui qui a pris du retard dès le début du SDI. La chambre des comptes note d’ailleurs que « Cette situation est assez caractéristique de la conduite du SDI. Le projet est, dès les premières années de mise en œuvre du schéma, reconsidéré et profondément modifié (... ) ces modifications trouvent leur origine dans une expression et une définition sans doute trop rapides des besoins ».

o De ce point de vue, l’application "mairies d’arrondissement" pour les équipements de petite enfance est un modèle du genre. La prose des magistrats se passe de commentaire : « Les porteurs du projet n’avaient pas prévu, à l’origine, le développement d’un module pour gérer les commissions d’attribution des places. Le besoin existait pourtant. Ce n’est qu’en février 2004, soit plus d’un an après le début de la mise en œuvre du SDI, que le comité de pilotage du projet a décidé de prendre en compte les besoins exprimés par les mairies d’arrondissement ». Demander leur avis aux utilisateurs… et pourquoi pas pratiquer la concertation avec les riverains et usagers de la voie publique quand on remodèle les places de Paris, tant qu’on y est ?!!!

2 - « Des dérapages de coût » généralisés … (Un diamant gros comme le Ritz)…

o L’application SALSA, destinée à la gestion de l’aide sociale légale pour les personnes âgées et les personnes handicapées, avait un coût initialement estimé à 0,852M€ ; son coût total réel devrait finalement être de 1,95M€. Face à une douloureuse augmentée deux fois et demi, les rapporteurs observent : « On ne peut que s’étonner du nombre de variations, quasi trimestrielles, de l’évaluation initiale. La même remarque vaut pour la date prévisionnelle de fin d’opération. Il n’était pas cohérent de prévoir en 2005 une fin des travaux en décembre 2006, alors qu’à cette date les études de préfiguration du projet étaient seulement en cours (...) Le diagnostic réalisé par Ernst & Young en 2008 n’envisage pas la fin de l’opération avant le deuxième trimestre 2010 ».

o « GO est une application dédiée au suivi et à la gestion des opérations de travaux. Compte tenu de la faiblesse et de l’incohérence des informations contenues dans le tableau de bord de l’application, on mesure mal son utilité ». Qu’en termes élégants ces choses là sont mises !

o Le projet de gestion du courrier vaut également le détour : cette application correspond à un progiciel de gestion du courrier dont la ville a décidé de faire l’acquisition en 2003 pour en doter toutes ses entités administratives. Le déploiement généralisé du progiciel devait initialement intervenir dans le courant de l’année 2005, son déploiement a été régulièrement repoussé, le dernier tableau de bord de 2007 l’envisageant pour le 31 décembre 2011, soit avec plus de cinq ans de retard.

Mais pourquoi diable un tel retard ? Allons, allons, ne me dites pas que vous n’avez pas deviné ! Bon, pour ceux qui le souhaiteraient, voici la solution, toujours donnée par les magistrats des comptes : « L’acquisition du progiciel a été faite sans consultation véritable des utilisateurs pour connaître leurs besoins, alors qu’il existait plusieurs offres sur le marché. Le projet retenu consistait à réaliser un paramétrage unique de l’application pour l'ensemble des services, cadrait mal avec l’organisation et les pratiques des différentes directions. Ce n’est qu’en janvier 2004, alors que le progiciel était déjà acquis, que cinq ateliers d’expression des besoins ont été mis en place ».

Vous avez bien lu ! Pour gérer le courrier des services municipaux, on achète un progiciel, « sans consultation véritable », et on ne se soucie de savoir si ce truc est utilisable par les intéressés qu’un an après !

Et le reste est à l’avenant (si on ose dire vu l’évolution du coût du bastringue) : « Des comités défaillants dans la conduite du projet » ; « Des tableaux de bord qui ne retracent pas l’évolution du projet (…). Le tableau de bord ne constitue pas un bon outil d’information des acteurs. Les fiches enregistrent, avec retard, l’évolution des coûts et des échéances, mais les commentaires accompagnant le tableau n’évoquent qu’exceptionnellement le projet (deux fois). Aussi ne peut-on avoir aucune idée des raisons du retard et de l’augmentation substantielle du coût ».

Il est bien dommage que les magistrats des comptes n’aient pu se faire une idée des raisons du retard et de l’augmentation substantielle du coût car ce coût a littéralement explosé. Coût initial total : 0,501 M€ ; coût total estimé : 2,780 M€, soit une multiplication par six. Mais le meilleur est pour la fin : « Par un courrier du 25 septembre 2008, les rapporteurs de la chambre ont été informés de la décision prise par la secrétaire générale de la ville d’abandonner le projet pour les motifs ainsi exposés :
« (…) l’outil P... relève davantage de développements à la demande que d’une solution progicielle prête à l’emploi, impliquant :
- la nécessité d’établir une nouvelle expression des besoins pour chaque déploiement, soit une absence de capitalisation sur les versions déjà en production ;
- un outil non stabilisé avec risque de régression lors des montées de version ;
- des formations lourdes ;
- une assistance et une maintenance complexifiée.
(…)
Enfin, compte tenu de la nécessité d’établir une nouvelle expression de besoins pour chaque déploiement, le coût d’investissement est désormais évalué à environ 12 M € ».

Bref, si on comprend bien, la ville envisageait initialement de dépenser 500.000, puis a jeté près de 3 millions d’euros par les fenêtres et envisage désormais d’engloutir 12 millions d'euros. AU SECOURS !!!

Enquête à suivre ...

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Samedi 23 Octobre 2010
Serge Federbusch






1.Posté par Meleze le 02/11/2010 12:54
Très drôle Fitzgerald. Moins drôle les gaspillages. Pourquoi mais pourquoi personne d'autre que vous n'en parle ??

2.Posté par Esquimau le 02/11/2010 12:57
Bonjour monsieur Federbusch.

Bravo à vous une fois encore. Je travaille à la DAC d'où mon pseudonyme, on y gèle de climat totalitaire sibérien. Et l'informatique ne m'en parlez pas que de gachis avec des portables remplacés inutilement, des systèms qui ne fonctionnent pas, les bibliothèques à la remorque.

3.Posté par Alain Lompert le 02/11/2010 22:05
D'ordinaire, il faut l'avouer, l'informatique génère beaucoup de gaspillages, y compris dans le secteur privé. mais j'ai effectivement l'impression que notre très cher maire, très très cher même, bat des records de mauvaise gestion. L'article que vous avez mentionné dans Capital et que j'ai lu fait un bon résumé des choses. Je vous signale aussi un texte paru dans le journal de Goasguen qui est très bien fait sur la hausse des impôts.

Mais est-ce que ça suffira pour réveiller nos concitoyens de Paris ? Il ne faut jamais désespérer. Continuez à nous informer.

4.Posté par Merion le 03/11/2010 10:12
Il serait urgent que l'opposition municipale cherche un remède à la piqûre de mouche tsé-tsé qu'elle a eue et se mette à un travail qui consisterait à faire le total des sommes gaspillées dans tous les domaines depuis 2001. Elle devrait ma,dater delanopolis pour faire ça mais y a-t-elle vraiment envie.?

5.Posté par Ordalie le 04/11/2010 09:42
Moi je ne comprends pas très bien ce que Fitzgerald vient faire dans cette sombre histoire, lui qui aimait temps le plaisir; le soleil et la vérité.

Comment faire pour arrêter cette gabegie pas magnifique mais monstrueuse, il n'y a malheureusement pas de censure citoyenne possible contre des élus aussi pourris et incompétents que ceux qu'on a à paris.

6.Posté par GRIMM le 05/11/2010 12:35
hors sujet
mais je lis de le Parisien d'aujourd'hui:

"Paris esT décrit comme la métropole la plus embouteillée d' Europe , devant Londres et le bassin de la Ruhr (la plus grande zone urbaine d'Allemagne) dans une étude inédite réalisée par Inrix une société ....
utlisant les données de l'Office européen des stastistiques Eurostat .Cet organisme a mené une comparaison dans six pays d'Europe..."

Felicitations à notre Maire et à Baupin


7.Posté par Pixel le 05/11/2010 16:31
Et comment... Une autre pépite de taille : la dématérialisation des conseils d'arrondissement sur le modèle du Conseil de Paris. Des centaines de portables achetés par la ville pour que les élus ne les utilisent quasiment pas. 800€ par tête minimum sans compter le temps colossal pour le déploiement.
Une dernière pour la route : la vidéo transmission des conseils. 20 000€ de matériel achetés pour rendre la démocratie plus participative : 20 internautes à l'arrivée pour suivre les débats de nos édiles (coût annuel de fonctionnement 25 000€ par mairie).
Et pendant ce temps, l'exécutif municipal parade en numérique...

8.Posté par Quiproquo le 06/11/2010 09:59
L'informatique ça n'est que le reflet du reste, ce n'est pas autonome. Si c'est la gabegie à Paris c'est parce que tout est mal géré et que l'organisation globale est nulle. Avec pour conséquence la flambée des dépenses et des impôts quand les caisses sont vides.

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