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BIS REPETITA

Les erreurs qui avaient conduit à l’échec de la candidature de Paris à l’organisation des Jeux Olympiques de 2012 ont été reproduites trait pour trait par Delanoë dans son entreprise de conquête du PS. Une forme de constance ?



BIS REPETITA
L’épisode peu glorieux de « l’Amour des Jeux », où Paris avait englouti en 2004 et 2005 un argent considérable à seule fin de permettre à son maire de se doter d’une stature de présidentiable dès l’échéance de 2007, est aujourd’hui largement oublié.

Il faut dire que Delanoë n’a guère intérêt à entretenir la mémoire de cet échec retentissant. Rappelons-nous : une propagande quasi-obsessionnelle inondant les médias, les Champs-Elysées mobilisés, des autocollants et des affiches partout, un pylône de soixante-dix mètres de haut, dit repère olympique, installé aux Batignolles et censé ployer sous le vent mais qui se révéla aussi inerte qu’un fer à souder, une atmosphère d’unanimisme malsain et, pour finir, une pitoyable équipée à Singapour soldée par une attitude de mauvais perdant.

Certes, la candidature de Delanoë dans la campagne interne au parti socialiste n’a pas mobilisé autant de moyens, loin s’en faut. Cela étant, à l’échelle de cette compétition, ses efforts furent considérables, surtout si on les compare à ceux de ses concurrents. Le maire de Paris a concédé lui-même avoir effectué plus de trente déplacements en province avec sa garde rapprochée, voyages dont on aimerait bien savoir, au passage, qui les a payés puisque ni le PS ni la fédération socialiste de Paris ne sont censés les prendre en charge, s’agissant d’un candidat parmi d’autres. Si Delanoë a réglé tout ce barnum sur sa cassette personnelle, elle doit être singulièrement vide ces jours-ci. De la même manière, son occupation du terrain médiatique, entre un livre aux ventes médiocres mais à la promotion massive et des dizaines d’articles et d’émissions en tous genres, fut opiniâtre.

Mais les mêmes causes produisirent les mêmes effets. Bien évidemment, dans les deux cas, Delanoë a accusé la déloyauté de ses concurrents : Sebastian Coe et Tony Blair en 2005, Aubry et Royal cette année. Ce serait pourtant être naïf que de croire qu’il n’a pas utilisé les mêmes méthodes que ses compétiteurs. La réalité est très différente. Elle tient à une succession de maladresses qui se ressemblent et qui l’ont conduit à l’échec.

1 – La volonté excessive de se mettre sur le devant de la scène.

Pour les J.O., Delanoë avait exigé de présider le comité de candidature alors que les Anglais, par exemple, l’avaient confié à un sportif, le susdit Sebastian Coe. Il s’agissait pour le maire de Paris de maximiser les profits de son occupation du terrain médiatique plutôt que de chercher à y installer la meilleure personne. Ces arrière-pensées très politiques créèrent un malaise au sein du CIO.

Cette situation s’est reproduite au PS où, contrairement à ses plus sérieuses rivales, Delanoë a tenu, jusqu’au vote sur les motions, à apparaître au premier rang des signataires en excluant toute autre hypothèse que celle de sa propre candidature. Il a ainsi figé le jeu des alliances possibles à son détriment.

2 – La tendance à écarter tout ce qui pourrait lui faire de l’ombre et ne s’entourer que de « Yes Men », pour employer une expression anglo-saxonne imagée.

Là où Aubry n’a pas craint d’attirer des stratèges et premiers couteaux de camps qu’elle ne dominait pas forcément (Fabius, Cambadélis) et là où Royal a accepté un temps de se mettre en retrait derrière de grands barons locaux eux-aussi très autonomes, comme Guérini et Collomb, Delanoë ne s’appuya que sur le peu signifiant Harlem Désir. Il tint ses alliés de poids (Hollande notamment) éloignés toute prise de décision. Tout ceci créa un climat de méfiance, palpable dans les fort rares meetings communs.

Cette défiance teintée de morgue fut déjà ressentie par les participants à l’équipée sauvage de l’ « Amour des Jeux », qu’ils soient politiques ou administratifs, notamment dans les rapports entre le maire et Philippe Baudillon, sorte de directeur technique de la candidature pour 2012, ou encore dans les conflits avec les diplomates qui suivaient le dossier, comme l’ambassadeur de France à Singapour, Jean-Paul Réau, qui vient d’ailleurs de nous quitter encore jeune et dont nous saluerons ici la mémoire.

3 – La surestimation de l’efficacité du bourrage de crâne et les pièges de l’effet-miroir.

Dans un cas comme dans l’autre, Delanoë a débordé d’intox, finissant par croire lui-même à son triomphe assuré. Au PS, l’arrogante déclaration sur la possibilité, pour sa motion, d’atteindre 50 % des suffrages dès le premier tour est encore dans tous les esprits. Comme la confusion volontairement entretenue entre les militants et les sympathisants socialistes, censés le plébisciter dans les sondages.

Il en fut de même pour les J.O. en 2004 et 2005. Ainsi, lorsque la mission d’évaluation du CIO vint à Paris, il fut proclamé qu’elle avait définitivement succombé à l’attrait de la candidature française. Tout comme Delanoë et consorts insinuaient que Londres et Madrid étaient définitivement plombés par leur retard technique ou le soutien de leurs gouvernements à la guerre en Irak.

4 – Last but not least, une erreur tactique fatale.

Pour les JO, elle a consisté à annoncer à l’avance que la candidature de Paris pour 2012 était la dernière. C’était maintenant ou jamais. Du fait des modalités assez particulières du scrutin (une ville était éliminée à chaque tour parmi les 5 finalistes et ses nationaux retrouvaient alors leur droit de vote), lors du dernier tour, les Espagnols votèrent naturellement Londres plutôt que Paris. Ils faisaient ainsi d’une pierre deux coups : déjà éliminés, ils écartaient Londres, choisi immédiatement, et Paris qui avait annoncé qu’il s’agissait de son ultime tentative. Ils préservaient au mieux leurs chances pour une éventuelle nouvelle candidature ce qui n’aurait pas été le cas s’ils avaient voté pour Paris, laissant Londres en situation de les concurrencer la fois suivante.

Une faute tactique scella aussi le sort de Delanoë au PS quand, par crainte de se retrouver troisième en cas d’alliance entre Hamon et Aubry, il ne se tint pas prêt à présenter sa candidature jusqu’à la dernière minute. Le fait de renoncer le conduisait pourtant à la marginalisation aussi sûrement qu’un échec, surtout s’il ne se désistait pour personne, comme ce fut le cas initialement.

Au total, c’est bien au même mélange d’arrogance et de croyance que la communication peut suppléer à toutes les erreurs que Delanoë doit ses déboires. En 2005, il fut possible au système D de se reconstruire et de substituer un nouvel objectif à celui qui avait été manqué. En 2008, la machine à fuir en avant ne sait plus où aller et devrait se transformer en machine à perdre.


Dimanche 23 Novembre 2008
Serge Federbusch





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