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Franz Xaver Messerschmidt et Tony Cragg au Louvre


Curieusement, les artistes qui succombèrent à la névrose narcissique de l'auto-portrait à répétition sont tous de grands créateurs. Franz Xaver Messerschmidt, un sculpteur germano-autrichien qui fondit ses traits, sous de légères variantes, dans le plomb et l'étain avec toutes sortes de rictus et de grimaces en est un exemple parfait. Hors norme et hors temps, son oeuvre singulière trace le portrait d'un homme au bord de l'explosion. L'intérêt de se rendre au Louvre pour l'admirer est renforcé par la présence des sculptures de Tony Cragg, concrétions aléatoires hautement séduisantes.



Franz Xaver Messerschmidt et Tony Cragg au Louvre
L'accumulation d'on ne sait quelle énergie dans le corps de Franz Xaver Messerschmidt le menaçait à tout moment d'une déflagration qui l'aurait éparpillé aux quatre vents. On doit se féliciter qu'il parvint à la dévier vers la sculpture, illustrant à merveille les bienfaits de la sublimation freudienne avant l'heure. Ah, ces Viennois ! Sexualité contrariée, penchants inavouables, haine de soi ? Peu importe, ces portraits crispés et convulsifs sont des merveilles d'anatomie grotesque qui auraient pu être fondus par des Romains de l'Antiquité comme par Jeff Koons. Messerschmidt, un bombardier à lui tout seul !


Franz Xaver Messerschmidt et Tony Cragg au Louvre
Autre intérêt de se rendre au Louvre en ce moment, l'exposition de sculptures de Tony Cragg, dispersées de-ci de-la dans le musée. Sous des formes aléatoires qui évoquent les érosions qu'on trouve parfois au bord des falaises granitiques rongées par l'océan, l'astucieux britannique stratifie des couches de bois et de matériau composite. Curieusement, ces plis font penser à ceux du cou de Messerschmidt. Mais c'est sûrement un hasard. En tous cas, la très belle sculpture rouge qui trône actuellement à l'entrée de la Pyramide mériterait d'y rester définitivement tant elle se marie étrangement bien avec la géométrie du lieu.

Lundi 21 Mars 2011
Serge Federbusch






1.Posté par Alain le 23/03/2011 11:05
Puisqu'il s'agit du Louvre, je ne résiste pas au plaisir de transmettre cette lettre envoyée à son directeur :

Monsieur le directeur,

Je découvre sur le site du votre musée : « Assistez aux matchs de boxe donnés par des danseurs hip-hop en écho aux sculptures du musée. Le chorégraphe propose une vision décalée de ce sport qu’il érige en art, jouant sur les contrastes et donnant aux codes et aux gestes de la boxe une dimension chorégraphique ». Vous avez en effet invité Mourad Merzouki et sa compagnie Kafig à boxer entre (ou avec) les statues des cours Puget et Khorsabad. Hercule ou Milon de Crotone défiés par 10 danseurs en baskets et gants vermillon, comme le souligne le Figaro du 7 mars : « les statues vont atteindre la grandiloquence des héros de péplum ». Malgré les échauffements de ces culturistes, la température des salles a encore baissé et Jean Clair serait au bord du « malaise » (1).

Cependant, j’apprends avec plaisir que le Louvre a enfin délaissé les activités poussiéreuses de conservation des œuvres d’art pour entrer dans l’âge moderne du renoncement, illustrant à merveille le titre du dernier livre de Chantal Delsol (2). Le Louvre renonce donc à être un musée pour accéder au statut, ô combien plus prestigieux, de salle polyvalente.

Il était temps, à l’exemple Triffouilly-les-oies ou des bourgades les plus reculées, Paris obtient enfin un Louvreland, un Pinacodrome, à la mesure de l’ homo festivus qui a supplanté le vieux sapiens.

J’ai donc le plaisir de solliciter la location (au choix) :
-de la salles des 7 cheminées pour l’anniversaire de Tante Paulette,
-de la galerie d’Apollon pour le Pacs de la petite dernière,
-du salon carré pour le concours de pétanque de mon comité d‘entreprise.

Veuillez agréer, Monsieur, mes sincères félicitations, pour votre contribution à l’américanisation, non, pardon, à « l’ alzheimerisation »de la culture française.

Signature....

Christine Sourgins


(1)A lire d’urgence : Jean Clair," L'Hiver de la culture" et "Malaise dans les musées", Flammarion, coll. Café Voltaire.

(2)Chantal Delsol, « L’âge du renoncement », Cerf, livre important, que je recommande et sur lequel un prochain Grain de sel reviendra.




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