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Bronca chez Diaghilev


Enfin un peu de bazar sur une scène artistique parisienne désespérante d'ennui ! Le Sadler's Wells de Londres, invité à Chaillot, a donné quatre ballets dont le dernier a provoqué départs en masse du public et huées. C'était pourtant de loin le plus intéressant.



Bronca chez Diaghilev
Ce qui est fascinant avec les réactions ulcérées des imbéciles, c'est que depuis des siècles tout le monde sait qu'elles signalent, en creux, l'intérêt d'une oeuvre et que, pourtant, il se trouve toujours des esprits étroits pour s'offusquer de telles oeuvres. Sans doute faut-il y voir quelque chose de rassurant sur la constance de l'espèce humaine.

Le Sadler's Wells, l'une des scènes les plus vivantes et prolifiques de la danse contemporaine en Europe, nous a donc dépêché quatre pièces dignes d'intérêt. Ce n'est pas que les trois premières aient démérité, bien au contraire. Les chorégraphies de Wayne Mc Gregor (Dyad 1909), Russell Maliphant (Afterlight) ou Sidi Larbi Cherkaoui (Faun) revisitent avec beaucoup de rigueur et d'efficacité cette formidable libération du ballet que Diaghilev, Nijinski et Anna Pavlova donnèrent à l'Europe il y a exactement un siècle.

Mais enfin, le plus mémorable restera sans conteste "Eternal damnation to Sancho et Sanchez" de Javier de Frutos, un vénézuélien installé à Londres depuis 15 ans. De quoi s'agit-il ? Sur une sorte de ring s'empoignent, se violentent et même se tuent, pendant une demi-heure, 5 damnés autour d'un roi difforme. ils sont livrés à des désirs qu'ils ne maîtrisent plus et qui les font sombrer dans la brutalité la plus extrême mais dont ils ne peuvent se libérer. Être torturé par ses instincts sans aucune échappatoire possible, tel est bien la définition de l'enfer. Cet univers inspiré de Bosch, Sade ou Pasolini et qui investit le ballet n'a au fond, rien de vraiment choquant. La pièce est autant théâtrale que dansée mais qui se soucie encore de ces distinctions ? Bref, le résultat est de qualité.

Cela n'était pas du goût de tout le monde puisque un bon quart de la salle a rapidement et bruyamment manifesté son courroux. Les imbéciles partis, le spectacle retrouva un peu de sérénité jusqu'aux lazzi d'usage au moment du salut final, expression il est vrai inappropriée s'agissant du spectacle de la damnation ... Un atrabilaire, particulièrement choqué par le fait que des scènes explicites, comme on dit maintenant, se déroulaient sur fond sonore de psalmodies mariales, partit en hurlant : "faites ça chez les musulmans et vous verrez ce qui va vous arriver !" Mais précisément, monsieur le triste sire, nous ne sommes pas chez les musulmans, tout au moins pas chez les intégristes de cette confession.

Notre propos n'a guère qu'un intérêt rétrospectif puisque les artistes du Sadler's Wells sont repartis bien vite à Londres. Mais puisqu'il suffit désormais de voir le bout du tunnel pour s'y rendre, vous pourrez noter ce spectacle sur un calepin en espérant qu'il s'y donne le jour où vous vous réfugierez dans cette ville éprise de liberté.


Dimanche 22 Novembre 2009
Serge Federbusch






1.Posté par Maurice le 28/11/2009 07:03
EH oui, même pour les spectateurs il est faisable de dire :
Les cons osent tout, c'est à ça qu'on les reconnait !

Cela me fait penser à Straviski...
"Le compositeur décrit ainsi la représentation dans ses Chroniques de ma vie : « [J'ai] quitté la salle dès les premières mesures du prélude, qui tout de suite soulevèrent des rires et des moqueries"

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