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Lucian Freud et autres beaubourgeoisies



Lucian Freud est l'un des derniers grands maîtres de la peinture classique et ceux qui en douteraient ressortiront bluffés de l'accrochage qui le célèbre à Beaubourg. Les autres expositions qui s'y tiennent, Erró, Elles@centrepompidou, Patrick Jouin et Sarkis ne déméritent pas mais sont loin d'être au même niveau.



Lucian Freud et autres beaubourgeoisies
Pauvre Lucian Freud. Depuis sa prime jeunesse, tout article le concernant rappelle d'entrée qu'il est le petit-fils de son illustrissime grand père. De ce point de vue, l'exposition de Beaubourg commence mal : par un tableau de 1944 où l'on voit la tête d'un zèbre apparaître au-dessus d'une sorte de ... divan ! Le thème mis en avant par Beaubourg est l'atelier du peintre comme lieu de création. C'est une approche assez banale, surtout pour un artiste qui s'aventure peu à l'extérieur. Mais peu importent les intentions des commissaires : immédiatement la qualité de la peinture de Freud s'impose. La composition de l'espace est toujours surprenante, l'insertion des personnages dans leur environnement originale, le travail sur la matière d'une richesse extrême, la manière de peindre fait fi de toutes les querelles d'écoles et s'inscrit dans la plus grande tradition classique, comme le rappelle d'ailleurs son intérêt marqué pour Chardin ou Cézanne. Mais avant tout, ce que Freud nous montre, c'est que la singularité de chaque personnage, de chaque plante, de chaque chien est, en elle-même, suffisante pour que la recherche de sa simple restitution suffise à faire d'une oeuvre d'art un acte unique. "Voir est plus difficile qu'inventer" disait autrefois Racine. Lucian est un voyant qui n'est pas loin d'égaler en peinture ce que papy Sigmund atteignit en psychologie. Son labeur qu'on devine acharné le place en tout cas au sommet de la peinture contemporaine.

A côté d'une telle maestria, il est bien difficile de tenir la route. Tant pis pour ce pauvre Erró dont les collages sont un peu répétitifs quoique de bonne facture. Il restera de son oeuvre une belle anticipation : l'intuition, dès 1968, que le maoisme et le guévarisme finiraient en poster, au même titre que l'oncle Picsou. Qu'y-a-t-il de plus ridicule qu'un T-shirt à l'effigie de Guevara ?

Autre semi-déception, l'exposition fleuve qui, sur tout un étage, rappelle la place des femmes dans l'art contemporain. Franchement, au terme de cette démonstration de force, que conclure si ce n'est que rien ne singularise la femme ? Elle est aussi douée et investie que l'homme dans à peu près tous les courants qui ont défrayé la chronique artistique depuis 100 ans. Dont acte. Bientôt, la seule chose qui différenciera l'homme de la femme ce sera le féminisme.

L'exposition du design de Patrick Jouin est sympathique mais ce garçon n'a pas encore, soyons honnête, une oeuvre bien considérable ni un langage stable et singulier. Et nous ne disons pas à ça parce qu'il a dessiné les bornettes de Vélib' !

Sarkis, exposé dans le cadre de la saison turque à Paris, est plus abouti et original. Le problème et que ses créations sont disséminées un peu partout dans le musée et que, sitôt vues, elles sont oubliées, comme perdues au milieu de tant de chefs-d'oeuvres. Un expo en bonne et due forme eût été plus appropriée.

Lundi 5 Avril 2010
Serge Federbusch





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